Le 31 mai 2022:
Merci chers Emmanuel, Charles et Ursula pour votre aimable invitation,
Chers collègues, Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie d’avoir bien voulu associer l’Afrique à cette séquence du Conseil européen sur la crise alimentaire engendrée par le conflit en Ukraine.
Cette crise affecte particulièrement nos pays en raison de leur forte dépendance des productions russes et ukrainiennes de blé.
Déjà, avant le conflit en Ukraine, les données de la FAO sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde en 2020 indiquaient que 282 millions de personnes, soit plus du tiers des individus sous alimentés dans le monde, vivent en Afrique.
S’y ajoutent 46 millions d’africains menacés de faim et de sous-alimentation à cause de la pandémie COVID-19.
C’est dire que la situation est préoccupante et que le pire est peut-être devant nous si la tendance actuelle se maintient.
J’ajoute que les engrais, si on en trouve d’ailleurs, sont maintenant trois fois plus chers qu'en 2021.
Selon certaines estimations, les rendements céréaliers en Afrique baisseraient de 20 à 50 % cette année.
Mais nous ne restons pas les bras croisés.
Si je prends l’exemple du Sénégal, nous avons fait un effort budgétaire exceptionnel pour la 2e fois consécutive en allouant une enveloppe de près de 107 millions d’euros pour notre présente campagne agricole (culture d’hivernage) ; soit une augmentation de 17% par rapport à la précédente.
Au total, nous avons relevé le budget de la campagne agricole de 75% en deux ans pour accélérer notre processus de souveraineté alimentaire.
A l’échelle africaine, nous avons tenu le 19 mai dernier une rencontre à l’initiative de la Banque Africaine de Développement pour lancer un plan africain d’urgence pour la production alimentaire à hauteur d’un milliard cinq cents millions de dollars.
L’objectif est deproduire 37,6 millions de tonnes de cultures vivrières.
Dans l’immédiat, nous souhaitons que tout soit fait pour libérer les stocks de céréales disponibles et assurer le transport et l’accès au marché afin d’éviter le scénario catastrophique de pénuries et de hausses généralisées des prix.
C’est là que nous sollicitons le soutien de nos partenaires.
Je sais qu’il y a aussi la question du blocage du port d’Odessa qui empêche l’écoulement des stocks de céréales.
Nous soutenons le mécanisme onusien proposé pour aider à débloquer la situation.
Je voudrais aussi vous dire que nos pays sont très inquiets quant aux effets collatéraux des perturbations provoquées par le blocage du système de paiement par swift à cause des sanctions.
Quand le système swift est perturbé, cela veut dire que même si les produits existent, le paiement devient compliqué, voire impossible.
Je voudrais insister pour que cette question soit examinée au plus vite par nos ministres compétents afin de trouver des solutions idoines.
Le dernier point que je souhaiterais aborder est lié à l’initiative Food and Agriculture Resilience (FARM).
C’est une excellente initiative dans ses trois objectifs visant à :
Pour les prochaines étapes, je souhaite que l’initiative FARM s’inscrive davantagedans uneapproche de partenariat et de complémentarité ; parce que le continent a de quoi se nourrir et aider à nourrir la planète.
En effet, avec ses 30 millions de km2, l’Afrique détient60% des terres arables de la planète.
Elle dispose également de ressources hydriques abondantes, avec une vingtaine de grands fleuves en plus des importantes ressources de la nappe phréatique.
Ce qui nous manque et ce que vous pouvez apporter, c’est l’investissement financier et technologique nécessaire pour produire plus et mieux, et créer une prospérité partagée.
C’est ce que j’entends par partenariat et complémentarité.
Il est nécessaire à mon avis de mutualiser nos moyens d’action pour éviter les chevauchements et avoir un impact plus significatif.
Je propose que l’Union européenne et la BAD examinent comment l’initiative FARM et le Plan d’urgence de la BAD pourraient s’articuler pour soutenir les objectifs suivants :
Enfin, en lieu et place d’une approche via les communautés économiques régionales, je pense qu’il faut directement valoriser et améliorer les initiatives et programmes nationaux existants.
Voilà le message que je voulais porter à votre attention.
Je vous salue tous avec amitié et considération. Continuons ensemble la quête de la paix.
Je vous remercie une fois de plus pour votre aimable invitation.